Il n’y a pas de crocodile au paradis des chiens

Depuis mon retour au travail en août 2022, j’avais l’impression de m’en sortir plutôt bien. Je croyais avoir atteint cet équilibre précaire entre la douleur quotidienne et la crise. Je m’étais même découvert un certain talent pour jongler avec travail et syndrome douloureux régional complexe.

Dans les dernières semaines, alors que ma vie tentait toujours de rentrer dans l’ordre, un petit pas à la fois, j’ai refusé de voir venir LA tempête. J’ai d’abord perdu le goût d’écrire, puis j’ai perdu les mots. J’ai fermé mes yeux remplis de larmes et de déni et j’ai espéré très fort que ce ne soit qu’un mauvais rêve.

Le choc a été brutal. J’ai été frappée de plein fouet.

J’ai dû prendre la décision la plus difficile de ma vie et c’est dans mes bras que mon petit chien Fiji s’est endormi. Mon fidèle compagnon, mon acolyte des presque 17 dernières années a traversé le pont de l’arc-en-ciel (the Rainbow Bridge).

Évidemment – oh surprise! – mon crocodile s’est réveillé sur-le-champ. Il fallait qu’il s’en mêle. Alors, au lieu de me laisser tranquille dans mon deuil et ma tristesse, il s’est rapidement manifesté dans tout son potentiel : il a affaibli mon système immunitaire (vive la saison des virus respiratoires!), il a rallumé la flamme brûlante de mon SDRC (vive le bûcher que sont devenus mes pieds!), il a reconnecté mon système nerveux à la centrale d’Hydro-Québec (vive les impulsions électriques dans mes deux jambes!) et il me tient éveillée la nuit (vive la douleur et les crampes nocturnes!).

La tempête déferle encore, c’est un véritable ouragan. Mais je lui tiens tête, à ce fichu crocodile. Je demeure droite et forte. Il est en crise, je m’en fiche. Il me pile sur les pieds, je me chausse quand même. Il me déconcentre, je l’ignore et je continue à travailler. Il se calmera, je ne lui en laisserai pas le choix : j’ai un doctorat en domptage de crocodile. Ça prendra le temps que ça prendra, mais je sais qu’il finira par se calmer. Je suis invincible.

Mon petit Fiji, je n’aurai pas su te protéger des ravages du temps, de ce temps qui, en ta compagnie, a passé beaucoup trop vite. Je n’oublierai jamais ta participation, ton dévouement et ton attention dans mon processus de réadaptation. Tu auras été ma première source de motivation pour apprendre à marcher dans la douleur.

Je suis soulagée: il n’y a pas de crocodile au paradis des chiens. Repose-toi, maintenant, Fiji. Trouve ce repos tant mérité, pour toi qui as été ce qui m’est arrivé de plus beau dans les 17 dernières années de ma vie. Sache que je chérirai à jamais nos doux souvenirs et, dans mon cœur, tu seras éternel. Tu es ma petite étoile dans le ciel.

Fiji Horth 2005-2022

Le NERVEmber 2022

Le NERVEmber est de retour!

(Pour en savoir davantage sur l’origine de cet événement, lisez ou relisez le billet de blogue publié en novembre 2021, directement accessible en cliquant ici).

Le terme NERVEmber est utilisé pour représenter le mois de la sensibilisation aux neuropathies. Cette expression, apparue en 2009 et formée de la fusion des mots « Nerves » et « November », représente plus d’une centaine de maladies et de conditions médicales occasionnant différents troubles du système nerveux, dont le syndrome douloureux régional complexe fait partie.

Vivre avec un SDRC, c’est vivre avec une douleur intense, à la fois chronique et neuropathique. Ce syndrome, encore trop méconnu, entraîne des séquelles importantes et des répercussions majeures sur la qualité de vie des gens qui en souffrent.

Pendant tout le mois de novembre, plusieurs événements permettront de sensibiliser la population aux douleurs neuropathiques et au SDRC. En voici quelques-uns.

  • Le jeudi 3 novembre 2022 : La septième édition de PainTalks2022, organisée par le Réseau québécois des étudiants-chercheurs sur la douleur (RQECD) sera offerte gratuitement en ligne et en présentiel à Montréal. Cliquez ici pour en savoir davantage sur l’événement et pour vous y inscrire si le sujet vous intéresse.
  • Le lundi 7 novembre 2022 : La journée Color the World Orange Day sera célébrée partout dans le monde pour sensibiliser les gens au syndrome douloureux régional complexe. Les villes participant à l’événement illumineront en orange des bâtiments gouvernementaux, des ponts ou des lieux touristiques, tels que les chutes du Niagara au Canada, le Skydance Bridge à Oklahoma City aux États-Unis, la mairie de Dublin en Irlande et le terminal de l’aéroport de Christchurch en Nouvelle-Zélande.
  • Du 6 au 12 novembre 2022 : La Semaine nationale de la sensibilisation à la douleur (SNSD)1 sera soulignée au Canada. Pour découvrir comment vous impliquer tout en demeurant dans le confort de votre foyer, cliquez ici.
  • Le mardi 15 novembre 2022 : Participez gratuitement au Facebook Live offert par l’International Pain Summit 2022. Cet événement organisé par iPain (International Pain Foundation) donnera la parole à cinq conférenciers soucieux de faire avancer la recherche sur la douleur.
  • Le jeudi 17 novembre 2022 : Une petite escapade à Phoenix en Arizona est-elle prévue à votre agenda ce jour-là? Profitez-en pour assister au spectacle Comic Pain Relief 2022 Comedy Show. Dommage qu’on ne puisse pas y assister virtuellement!
  • Le mardi 22 novembre 2022 : Une entrevue intitulée « The Nerve of Gratitude » sera diffusée en direct sur la page Instagram @internationalpainfoundation. Nous pourrons assister à un entretien réalisé avec Barby Ingle, présidente de iPain et éditrice en chef de la revue iPain Living Magazine.

Ce mois-ci, vous pourriez aussi voir apparaître plusieurs mot-clés cliquables sur les réseaux sociaux, tels que #NERVEmber, #PrioriteDouleur, #BURNINGforaCURE, #CRPSOrangeDay, #GoOrange et #CRPSAwareness.

Alors que 2022 tire à sa fin, le SDRC demeure une maladie mystérieuse, difficilement traitable, non guérissable et peu connue encore à ce jour. C’est pourquoi il est important de poursuivre le travail de sensibilisation aux maladies neuropathiques et au SDRC.

Cher lectorat, l’intérêt que vous portez à mon blogue appuie mon désir de continuer à me mobiliser pour la cause. Chaque billet lu représente une personne informée de plus : merci pour votre incroyable soutien.

  1. National Pain Awareness Week, NPAW.

Retour au travail et SDRC ne font pas toujours bon ménage

À mon retour au travail, c’est avec bonheur que j’ai revu mes collègues et ami.e.s, mais c’est avec soulagement que j’ai retrouvé mes outils ergonomiques (chaise, tabouret, table ajustable, repose-pied), accessoires fort utiles qui m’aideront assurément à maintenir mon SDRC sous contrôle.

Or, après six ans à temps partiel et les derniers quinze mois de mise en pause complète, je me rends bien compte que mon corps a de la difficulté à s’adapter au rythme du temps plein… C’est sans doute normal, me direz-vous!

J’ai encore de la difficulté à gérer ma douleur « résiduelle » et mon niveau de fatigabilité demeure très élevé. Malgré ces inconvénients, je demeure heureuse d’être de retour, d’occuper mes journées à me rendre utile et, je l’espère, à faire éventuellement une petite différence dans la vie des élèves qui me seront confiés dans mon nouveau mandat.

Ce que j’avais sous-estimé, cependant, c’est un détail qui peut sembler anodin pour le commun des mortels : le port de souliers! Mon syndrome logeant dans mes membres inférieurs, laissez-moi vous dire que cela ressemble parfois à de la torture! Évidemment, il serait un peu farfelu et franchement imprudent de travailler dans une école secondaire sans chaussures…

De plus, je m’entraîne moins ces jours-ci. En vérité, je n’y arrive pas du tout. Mon retour au travail gobe pratiquement toute mon énergie (et au retour à la maison, vous n’imaginez pas quel plaisir j’éprouve à retirer mes souliers!). J’ose espérer que cette période d’ajustement ne sera que temporaire. Avec le temps, je demeure optimiste de pouvoir retrouver mes repères (ou de m’en donner d’autres) pour enfin conjuguer efficacement et naturellement travail, maladie et vie personnelle.

Si mon crocodile se tient relativement tranquille depuis la rentrée scolaire, il me rappelle tout de même quotidiennement qu’il est bien présent, tel un ennuyant mais fidèle compagnon. Je parviens encore à le gérer, malgré le malin plaisir qu’il éprouve à me piler sur les pieds, à me marteler les orteils et à tenter de mettre mon système nerveux en feu. Il va sans dire que je fais ce qu’il faut pour l’ignorer, mais c’est tout de même embêtant de travailler avec un crocodile aussi mal élevé…

Je connais mon crocodile par cœur, alors j’essaie de contourner les obstacles qui pourraient le réveiller. Pour le bien-être de mon système nerveux, je m’efforce de rester calme et zen. J’essaie de maintenir au quotidien ma sérénité dans les aléas du monde du travail et de mon SDRC. Ce n’est pas toujours facile, je dois l’admettre, mais au moins j’essaie.

Je me félicite pour les accomplissements quotidiens, je me gâte de temps à autre pour célébrer une petite victoire (comme des sushis pour souligner ma première semaine pleine au travail) et je me retrousse les manches lorsque mon crocodile veut déraper. Le processus est loin d’être parfait, mais je me donne le devoir de rester concentrée sur le positif et de continuer à espérer le meilleur.

À la découverte d’une nouvelle normalité

Depuis 2016, j’ai eu si peur d’être déclarée invalide ou inapte à exercer mon emploi d’enseignante et, à maintes reprises, je suis passée si proche d’en arriver à cette triste conclusion…

Or, après six ans de colère, de frustration et de peine, après six ans de traitements, de thérapies et de médication, après six ans de douleur et de larmes, après six ans en arrêt complet ou au travail dix heures par semaine, après 15 mois consécutifs «stationnée» chez moi, je suis enfin de retour de travail à temps plein! (Eh oui, on a tiré sur le pansement d’un coup sec: de chez moi à 32 heures de travail par semaine sans transition ni retour progressif!)

Je me suis battue bec et ongles pour parvenir à dompter mon crocodile et pour défier les pronostics de ma maladie. Heureusement, je n’ai pas mené ce combat toute seule : j’ai été entourée de mes parents, de ma famille, de mes ami.e.s, de mon médecin traitant, de trois médecins spécialistes, d’une psychologue et de neuf thérapeutes qui m’ont tous aidée à me dépasser et à relever les nombreux défis lancés par la bête sauvage. Quelle grosse équipe de feu!

Je ne remercierai jamais assez toutes ces personnes formidables pour leur dévouement, leurs encouragements et leur écoute.

Mon retour au travail et ma rémission de mon syndrome douloureux régional complexe sont mes plus belles réussites de ces six dernières années.

Depuis mai 2016, ma vie est tout sauf normale. J’en aurai vécu, des montagnes russes! Je suis heureuse d’enfin voir briller les étoiles dans le ciel grâce à ma rémission.

Malgré les épreuves liées à la maladie et ayant eu un impact sur ma vie personnelle et professionnelle, je serai demeurée forte et droite dans ma tempête.

Je ne dois jamais l’oublier : je suis une guerrière.

Je ne sais pas de quoi demain sera fait, mais aujourd’hui, je souhaite célébrer cette victoire et cet espoir d’un retour à une vie presque normale (car vivre avec un crocodile, c’est loin d’être normal!).

Mon retour au travail marque aussi une petite mise en pause de ce blogue. Vous comprendrez sûrement qu’après toutes les épreuves traversées, je souhaite aujourd’hui me consacrer entièrement à ce retour au travail que j’attendais impatiemment, car il me faut éviter à tout prix des crises de douleur ou pire, une rechute de ma maladie.

Je continuerai tout de même à publier des billets de temps à autre, mais je ne le ferai plus de façon hebdomadaire comme je le faisais depuis les douze derniers mois.

Cela m’aura pris du temps avant d’avoir le courage de raconter sur le Web mon expérience avec le SDRC, mais j’ai fini par oser. Depuis septembre 2021, vous m’aurez lue chaque semaine avec assiduité et curiosité. Merci de m’avoir accompagnée dans les nombreux périples que m’a fait vivre mon crocodile. Vous m’avez permis de briser l’isolement et votre présence virtuelle a été une source de motivation, de réconfort et de bonheur.

Je sors grandie de cette expérience de blogueuse. L’écriture hebdomadaire a été une véritable thérapie. J’ai aimé jouer avec les mots pour vous présenter en quoi consiste ce syndrome si complexe (et qui porte si bien son nom!).

Je vous quitte donc pour un moment, mais je reviendrai dès que possible, c’est promis. Ce matin, je sortirai de la pièce tout doucement, sans bruit, sur la pointe des pieds. Je ne veux surtout pas réveiller ce crocodile nouvellement apprivoisé qui, pour l’heure, sommeille paisiblement à mes côtés. Chut! La bête est calme, laissons-la dormir confortablement tant qu’elle le souhaite puisqu’aujourd’hui, elle me laisse vivre à nouveau.

Questions au sujet de la rémission d’un SDRC

À la suite de la publication du billet de la semaine dernière, on m’a posé quelques questions en privé au sujet de la rémission.

Voici deux d’entre elles.

La rémission d’un SDRC et celle d’un cancer : cela signifie-t-il la même chose?

Bien qu’il soit incurable à ce jour, le syndrome douloureux régional complexe ne pose aucun risque mortel pour les gens qui en souffrent. Donc, on ne peut donc absolument pas comparer un SDRC à un diagnostic de cancer.

Être en rémission d’un SDRC, c’est une façon d’exprimer :

  • que la maladie est contrôlable malgré sa permanence;
  • que les crises de douleur intense sont moins fréquentes et plus courtes;
  • que les patient.e.s parviennent à fonctionner dans leur quotidien malgré une douleur dite « habituelle ».

Le seul point commun de ces deux types de rémission est que les risques de rechute de la maladie existent.

La douleur « résiduelle », celle du quotidien en rémission, à quoi ressemble-t-elle?

Dans mon cas, ce sont les mêmes sensations que je ressens depuis le début de la maladie, celles qui se manifestent le plus fréquemment. Il s’agit notamment d’engourdissements, de tiraillements, de sensations de brûlure et de pulsations électriques.

D’autres personnes pourraient ressentir davantage de picotements et moins de fourmillements, par exemple. Chaque patient.e souffrant d’un SDRC observe des manifestations particulières de la maladie; c’est d’ailleurs ce qui contribue à rendre son diagnostic si difficile.

Selon mon expérience, être en rémission d’un SDRC, c’est considérer :

  • que mon corps s’est « habitué » aux sensations douloureuses relatives au syndrome;
  • que celles-ci sont maintenant perçues comme étant « normales »;
  • que je sais mieux reconnaître les signaux indiquant le moment de ralentir, de faire une pause ou de m’arrêter;
  • que l’intensité des manifestations de la maladie peut continuer à varier selon les journées, la température ou les activités, mais que celles-ci demeurent contrôlables dans la mesure du possible.

C’est aussi savoir :

  • que la médication joue un rôle important;
  • que les exercices prescrits doivent être effectués pour maintenir la mobilité des articulations et une hygiène de vie saine et positive;
  • qu’une rechute de la maladie est toujours possible et peut survenir à tout moment (c’est-à-dire une douleur de nouveau incontrôlable et invalidante).

Si vous avez d’autres questions, écrivez-moi!

Guérison impossible, rémission possible

À ce jour, le SDRC est une maladie incurable.

Mon crocodile ne partira jamais. Nous sommes liés l’un à l’autre pour l’éternité.

Or, avec le temps (beaucoup de temps!), je suis parvenue à le dompter.

Oui, j’y suis arrivée. J’ai déjoué les pronostics.

La bête sauvage est domptée!

Mon étrange crocodile et moi sommes arrivés à un point de notre cohabitation où il a appris à me ficher la paix (ou presque!). Il a appris à se tenir, à rester sagement à mes côtés. Toutefois, il continuera sans cesse à me surveiller de ses yeux malicieux, attendant patiemment l’événement qui le fera sortir de sa fausse tranquillité…

Après six ans de travail acharné, mon anesthésiologiste m’a déclarée en rémission de mon SDRC. Ça m’aura pris six ans de douleur, de pleurs et de colère, d’efforts et de moments de découragement, de hauts et de bas, mais, ô miracle, j’ai réussi.

Je suis en rémission de mon crocodile!

«Rémission» ne veut pas dire «guérison». On ne guérit pas d’un SDRC, c’est incurable. C’est à vie que je continuerai à ressentir de la douleur, des engourdissements et des décharges électriques. La rémission signifie seulement que mon crocodile est suffisamment contrôlé pour être contrôlable. Or, il ne me faudra jamais oublier qu’il demeure un animal sauvage qui peut s’exciter ou se rebeller à tout moment, un peu, beaucoup ou même passionnément.

Certain.e.s patient.e.s du SDRC ne vivront jamais une rémission, alors que d’autres rechuteront, trop rapidement ou dans plusieurs années. Je suis consciente de la chance que j’ai dans l’instant présent. Je connais des gens souffrant du SDRC depuis plus longtemps que moi et pour qui la rémission demeure un rêve inatteignable.

Je ne sais pas de quoi mon avenir sera fait, mais aujourd’hui même, je peux affirmer que j’ai atteint cet équilibre dont j’ai tant rêvé et auquel, parfois, je ne croyais plus.

Malgré tout, je dois continuer de prendre ma médication et d’effectuer rigoureusement mes exercices, car c’est grandement grâce à cela que j’ai trouvé les outils nécessaires pour apprivoiser la bête.

Je ne serai jamais guérie. Je ressentirai toujours de la douleur. Je ne serai jamais à l’abri des crises ou, pire, d’une rechute de la maladie. Or, chaque fois que mon détestable crocodile décidera de sortir de sa bulle, j’ose croire que j’aurai la force, le courage et la ténacité de le ramener à l’ordre. Gare à lui!

Sache-le, crocodile : je suis une redoutable guerrière.

Suggestions de lecture

Tout comme c’était le cas pour l’ouvrage Libérez-vous de la douleur par la méditation et l’ACT de Frédérick Dionne, les deux ouvrages de Russ Harris que je vous présente aujourd’hui mettent en valeur l’approche de l’ACT (Acceptance and Commitment Therapy):

  • Harris, Russ (2021). Le Piège du bonheur. Canada : Les Éditions de l’Homme. ISBN 9782761957694.
  • Harris, Russ (2013). Le choc de la réalité – Surmonter les épreuves grâce à la thérapie ACT. Canada : Les Éditions de l’Homme. ISBN 9782761932196.

Présentation :

Dr Russ Harris est un médecin, un psychothérapeute, un coach de vie et un conférencier se spécialisant dans la gestion du stress. Il est un porte-parole aguerri de la thérapie par l’ACT, laquelle repose sur l’acceptation et l’action simultanées (Le Piège du bonheur, p.74).

Son ouvrage le plus connu, Le Piège du bonheur, a été publié en français pour la première fois en 2009, puis il a ensuite été réédité à quelques reprises.

Pour en savoir davantage sur l’approche du Dr Harris: http://thehappinesstrap.com

Le Piège du bonheur

Pour le Dr Harris, «[l’acceptation] ne signifie pas que vous deviez endurer n’importe quoi ou vous résigner à tout. L’acceptation est une façon d’embrasser la vie, au lieu de simplement la tolérer. L’acceptation vous permet littéralement de « profiter de ce qui vous est offert ». Elle ne vous oblige pas à renoncer à quoi que ce soit ou à accepter la défaite; elle ne vous dit pas de serrer les dents et de tout endurer. L’acceptation consiste à vous ouvrir pleinement à votre situation présente – à reconnaître ce qu’elle est, dans le moment présent, et à renoncer à vous y opposer» (p.73).

La philosophie de l’ACT repose essentiellement sur ceci: développer le courage de résoudre ce qui peut être résolu, la sérénité voulue pour accepter ce qui ne peut pas l’être, ainsi que la sagesse d’en connaître la différence.

Pour l’auteur, peu importe le problème auquel vous vous heurtez, il n’y a que deux options possibles (p.258):

  1. Accepter le problème pour ce qu’il est;
  2. Agir, s’engager, passer à l’action pour améliorer cette même situation.

Le Choc de la réalité – Surmonter les épreuves grâce à la thérapie ACT

Dr Harris applique ici l’ACT au choc de la réalité, que nous vivons quand la vie nous assène un coup dur. Il peut s’agir, entre autres, de la perte d’un être aimé, d’un diagnostic, d’un accident, d’une trahison, d’un incendie, etc. «Peu importe la forme qu’il prend, une chose est sûre : le choc de la réalité fait mal» (p.4).

Le choc dont l’auteur a beaucoup souffert est lorsqu’il a appris que son fils était autiste. Il s’appuie donc sur une de ses propres expériences pour mettre ses enseignements en contexte. «Je ne cesserai jamais d’être impressionné par la grande passion que nous pouvons trouver en nous lorsque nous sommes aux prises avec une douleur immense. Les crises terribles révèlent souvent la meilleure part de nous-mêmes. Elles nous forcent à ouvrir notre cœur pour chercher ce qui se trouve à l’intérieur, à creuser en nous pour découvrir de quoi nous sommes vraiment faits» (p.116).

Dans cet ouvrage rempli d’exercices courts et pertinents, l’auteur souhaite mettre l’accent sur notre épanouissement intérieur, l’autocompassion, nos valeurs et notre engagement, tous quatre étant au cœur de la thérapie ACT. «[Peu] importe le type de fossé auquel nous devons faire face – que ce soit une maladie mortelle, une infidélité, l’obésité, une fausse couche, l’isolement social ou une perte d’emploi –, une action sera requise. Si nous voulons agir de façon efficace face à l’adversité, nous devons donc impérativement nous extirper de nos pensées pour nous engager pleinement dans le monde qui nous entoure» (p.34-35).

Mon commentaire :

Les émotions lourdes et négatives entraînent souvent des sensations physiques pénibles, ce qui ne nous aide aucunement. C’est un peu l’histoire de l’oeuf et de la poule: lequel arrive en premier? Bref, les émotions négatives alimentent la douleur et vice-versa.

L’approche du Dr Harris propose d’accepter la situation négative ou douloureuse pour ce qu’elle est, pour ensuite agir en se connectant à ses valeurs. Par exemple, dans une situation de crise de douleur, on peut se reconnecter à nos valeurs familiales ou amicales, puis agir en téléphonant à un proche ou en invitant celui-ci à la maison. Si la spiritualité occupe une place importante dans notre vie, nous pouvons nous promener dans la nature ou encore sortir pour admirer le coucher du soleil. La santé est-elle une valeur fondamentale? On peut faire des étirements ou effectuer une courte séance de tai-chi. L’idée du Dr Harris est que, dans les moments difficiles, il faut se reconnecter à ce qui nous est cher et précieux: nos valeurs.

En cas de douleur invalidante, on peut aussi mettre en place différentes stratégies de gestion de crise: observer cinq objets autour de nous, prendre le temps de respirer plus lentement, etc. Bref, cette gamme de stratégies s’avère utile pour gérer la douleur et les émotions qui l’alimentent (Le Piège du bonheur, p.261-262).

J’ai choisi de vous présenter ces deux ouvrages parce que je trouve qu’ils sont en lien avec le «vivre avec» dont je vous ai parlé dans plusieurs billets. Que l’on fasse allusion à des pensées négatives ou à la douleur, c’est du pareil au même: plus on tente de lutter contre la douleur en l’alimentant par des émotions négatives (la peur, la colère, l’anxiété ou même le dégoût et la honte), plus on aggrave la situation… ce qui s’avère mauvais, voire dévastateur, pour la santé.

Bonne lecture!

Quels traitements pour le SDRC? L’ergothérapie et la physiothérapie

Ce texte n’engage que mon expérience personnelle.

J’en ai eu, des rendez-vous, depuis 2016! Deux physiothérapeutes, quatre ergothérapeutes, une kinésiologue, une psychologue et une acupunctrice se sont succédées tour à tour dans mon agenda.

Lorsque le syndrome s’impose, c’est comme si notre ordinateur interne ne reconnaissait plus le membre atteint, comme si celui-ci n’était plus là. Grosso modo, on pourrait dire que c’est le contraire du membre-fantôme ressenti chez les personnes amputées : ces gens perçoivent la présence de leur main ou de leur jambe malgré leur amputation alors qu’avec le SDRC, le contraire se produit. C’est le cerveau qui « rejette » le membre atteint, même si celui-ci est bel et bien attaché au corps. Oui, c’est vraiment une maladie étrange et cela justifie tout le sérieux que l’on doit accorder aux exercices de rééducation.

Petite confidence : il m’est parfois arrivé de douter de la pertinence et de l’efficacité de certains exercices rendus obligatoires par mes physiothérapeutes et mes ergothérapeutes. Au début de la maladie, ces techniques me paraissaient farfelues, jusqu’à ce que je comprenne réellement leur potentiel rééducatif dans le processus de réadaptation du SDRC.

Voici donc trois types d’exercices d’ergothérapie que j’ai dû faire et refaire pendant plusieurs mois pour rééduquer mon système nerveux. Je vous invite à consulter les sources présentées à la fin de ce billet pour en apprendre davantage sur chacune de ces thérapies.

Thérapie du miroir :

Cette technique exige de placer un miroir de façon à cacher le membre atteint par le SDRC, la surface miroitante vers le membre sain. Je devais ensuite observer mon pied droit dans le miroir, dont le reflet donnait l’impression qu’il s’agissait du pied gauche. Par conséquent, mon cerveau pouvait observer deux pieds « normaux ».

Reconnaissance du pied :

Le but de l’exercice est aussi de rééduquer le cerveau à reconnaître l’existence des deux membres. Pour ce faire, je devais regarder des photos de pieds orientés sous différents angles (sur le dessus, en dessous, sur le côté, pointés, tordus, etc.) et déterminer s’il s’agissait du droit ou du gauche.

Rééducation à la sensibilité ou thérapie du touche-à-tout :

Afin de diminuer l’allodynie dont je souffrais, j’ai dû travailler à désensibiliser mon pied gauche (le plus atteint) en le stimulant par le toucher. Je devais donc supporter le contact de différentes textures, dont une peau de lapin toute douce pour commencer. Puis, en progressant selon la tolérance de mon pied, il me fallait augmenter la durée de l’activité et la pression exercée, puis changer de tissu (soie, coton, laine, etc.) et recommencer. J’ai aussi dû passer régulièrement des petits tests avec des aiguilles afin de mesurer la régression de l’allodynie sur les différentes régions du pied.

Même si parfois je n’y croyais plus, même si parfois je trouvais que les exercices étaient farfelus, c’est l’entêtement de mes thérapeutes qui a fini par avoir raison!

Il est impératif de rappeler que plus les thérapies sont entreprises rapidement après le diagnostic, meilleures sont les chances que la rééducation s’effectue de façon optimale et que les dommages permanents soient moins dramatiques.

Il est fort possible qu’un.e ergothérapeute propose d’autres techniques thérapeutiques, selon le membre atteint par le SDRC ou le type de traitement à préconiser en fonction du stade de la maladie. On pourrait penser, entre autres, à la rééducation thermique. Or, mes lectures indiquent que les trois approches présentées dans ce billet sont parmi les plus fréquemment utilisées.

La médication et les traitements à l’hôpital ont joué eux aussi un grand rôle tout au long de ma réadaptation, car sans eux, la douleur occasionnée par ces différentes thérapies serait devenue insupportable, voire intraitable. C’est véritablement la combinaison médication-traitements-thérapies qui a contribué à ma rééducation et à ma réadaptation.

Sources consultées :

[s.n.] (2017). « La thérapie miroir dans les cas de SDRC », dans Thérapiemiroir.com. [En ligne]. Consulté le 15 juin 2022.

Aranda, Guillaume (2014). Le programme d’imagerie motrice – Nouvelle approche dans la rééducation du syndrome douloureux régional complexe. [En ligne]. Consulté le 15 juin 2022.

Calva, Valérie et Desjardins, Isabelle (2017). Le traitement de la douleur neuropathique selon la méthode de la rééducation sensitive. [En ligne]. Consulté le 16 juin 2022.

Louw, Adrian et al. (2014). Why Are My Nerves So Sensitive? Neuroscience Education for Patients with CRPS or RSD. États-Unis : International Spine and Pain Institute. ISBN 978-0-9904230-4-1.

Watson, James C. (2020). « Syndrome douloureux régional complexe », dans Le manuel Merck – Version grand public. [En ligne]. Consulté le 16 mars 2022.

Quels traitements pour le SDRC? La médication et les traitements en milieu hospitalier

Ce texte n’engage que mon expérience personnelle. Le but de ce billet n’est pas de nommer mes médicaments ni de comparer ma situation à la vôtre, mais simplement de présenter ma réalité en tant que personne souffrant du SDRC. Un.e autre patient.e pourrait avoir subi des traitements fort différents.

Projet expérimental : En 2017, quelques mois après avoir reçu mon diagnostic, soit près d’un an après mon accident de travail, un neurochirurgien estimait que j’étais candidate pour un neurostimulateur sous-cutané, un petit appareil placé sous la peau. Des électrodes seraient insérées près de ma moelle épinière et serviraient à bloquer les signaux de la douleur avant qu’ils n’arrivent au cerveau. Toute cette technologie serait contrôlée à l’aide d’une télécommande (ou de mon cellulaire!). Ouaip, j’en étais là tellement la douleur était incontrôlable et insupportable à cette époque. Heureusement, le vent a fini par tourner pour moi, grâce aux différents traitements dont j’ai bénéficié. J’ai donc pu échapper à cette intervention chirurgicale.

Traitements : Perfusions de kétamine et blocs analgésiques, dont les blocs lombaires sympathiques et les épidurales caudales (voir les notes à la fin de ce billet). En six ans, j’en ai subi, des traitements à l’hôpital!

Médicaments : La prise de nombreux médicaments n’a pas été sans effets secondaires : il est tout à fait normal que certaines molécules, une fois combinées, aient un impact sur notre niveau d’énergie, sur notre système digestif, sur la concentration, l’attention et la mémoire.

Le SDRC est, je vous le rappelle, incurable et difficilement traitable. Il est donc normal que plusieurs approches pharmacologiques soient proposées aux patient.e.s. L’important, c’est de finir par trouver la combinaison la plus efficace possible pour chacun d’entre nous, ce qui peut s’avérer long et ardu.

Les traitements subis et les médicaments que je consomme aujourd’hui sont le résultat de nombreux essais. Ma situation semble désormais stabilisée, mais je ne suis en aucun cas à l’abri d’une variation de tempérament de mon crocodile.

Malheureusement, utilisés de façon isolés, les médicaments et les traitements ne parviennent pas, à eux seuls, à redonner une vie décente aux patient.e.s souffrant du SDRC. Il est donc essentiel de préconiser une approche multimodale (médicaments ET thérapies) pour que les gens aient les meilleures chances de parvenir à gérer leur douleur et à améliorer leur qualité de vie.

Certaines de ces thérapies feront l’objet de mon prochain billet.

Notes :

  • Lors d’un bloc sympathique lombaire, l’anesthésiant est injecté entre les vertèbres L2 et L5.
  • Lors d’une épidurale caudale, l’aiguille est insérée entre le sacrum et le coccyx.

Sources consultées :

Louw, Adrian et al. (2014). Why Are My Nerves So Sensitive? Neuroscience Education for Patients with CRPS or RSD. États-Unis : International Spine and Pain Institute. ISBN 978-0-9904230-4-1.

NCGO. (2020). Bloc du nerf sympathique lombaire. [En ligne]. Consulté le 16 juin 2022.

Watson, James C. (2020). « Syndrome douloureux régional complexe », dans Le manuel Merck – Version grand public. [En ligne]. Consulté le 16 juin 2022.

Suggestion de lecture

Chez les personnes souffrant du SDRC, nous savons désormais qu’il est assez répandu de ressentir de l’anxiété ou du stress. Ces deux émotions, qui s’additionnent parfois, peuvent provoquer des crises de douleur. C’est pourquoi il est important de comprendre de quoi il s’agit afin de pouvoir mieux gérer notre douleur par la suite.

L’Anxiété sans complexe (2020)

Maffolini, Sophie (2020). L’Anxiété sans complexe. Montréal : Les Éditions Cardinal. ISBN 978-2-924646-88-5.

Présentation :

Dans un récent billet, je vous présentais Dre Sophie Maffolini, autrice du livre Méditer sans complexe – 28 jours de pleine conscience. Dans L’Anxiété sans complexe, elle nous accompagne pendant sept semaines et elle nous invite à effectuer, dans chacune d’elles, des réflexions théoriques et des exercices pratiques en lien avec le thème hebdomadaire abordé.

Pour en savoir davantage : https://sophiemaffolini.com/programme-l-anxiete-sans-complexe

Mon commentaire :

Dans cet ouvrage, l’autrice propose, entre autres, un chapitre soulignant l’importance d’accepter l’incertitude (semaine 7). Lorsqu’on vit avec un SDRC, je crois que c’est l’une des sources d’anxiété les plus percutantes et préoccupantes.

Les exercices et les missions hebdomadaires, à tenir dans un journal, sont d’incroyables sources de réflexion et nous aident à porter un regard bienveillant sur notre réalité. Il est pratique d’avoir des sections différentes pour chaque semaine, car de cette façon, nous pouvons progresser doucement en morcelant notre lecture et la réalisation des activités réflexives sans perdre le fil.

De plus, cet ouvrage comprend de magnifiques images apaisantes et la mise en page est remplie de douceur et de légèreté. L’intérêt de ce livre réside donc autant dans son contenant que dans son contenu.

Prendre le temps de comprendre l’anxiété, c’est nous donner l’occasion de l’apprivoiser. C’est pourquoi je vous recommande cette douce lecture.